Tredrez

Trédrez doit son importance à la bordure côtière qui amènera à la constitution puis au développement de son territoire aujourd'hui le plus peuplé : Locquémeau. Jusque là, elle dépendait de Ploumilliau, fondée par un moine venu d'Outre-Manche, Millau. "Treb" (village, en vieux breton) et "traez" (grève) sont les deux particules qui formeront son nom. L'appellation Tresdretz persistera jusqu'au milieu du 14ème siècle.

Cette commune deviendra indépendante et élira sa première municipalité en 1790.

Tredrez sera paroisse dès 1284 mais transformée par la Révolution en succursale de celle de Saint-Michel-en-Grève, de 1806 jusqu'en 1826.

L'église actuelle fut construite à partir de 1500. Elle fut élevée sur les ruines d'un ancien lieu de culte dont Saint-Yves de Kermartin (Minihy en Tréguier) fut le premier recteur à l'avènement de l'indépendance de la paroisse, de 1284 à 1292. Par le passé, elle constituait une trève dépendant de Ploumillau, dédiée à Saint-Laurent. De style gothique flamboyant pour l'essentiel, elle fut agrandie par l'adjonction d'un transept au sud de la nef en 1699, d'une chapelle abritant les fonts baptismaux en 1858 et du bas-côté sud en 1865.

Quelques restaurations seront entreprises au cours des siècles, tels la sacrisite et le mur situé au nord, reconstruits en 1873, et le clocher abattu par la foudre en 1881 et immédiatement relevé dans le même style.

Ornée de gargouilles représentant des animaux fantastiques, la façade située au sud est accessible par l'entrée principale. Ouverte entre deux piliers de granit, elle est prolongée d'un échalier dont le côté droit a reçu, au 19ème siècle, une pièce rapportée. Celle-ci, appelée "oreiller de Saint-Yves", trônait jusqu'alors dans un champ situé près de Kervorgan, où elle faisait l'objet de cérémonies superstitieuses ... L'enclos paroissial est orné, de part et d'autre de l'édifice, de croix simples dont la première est plantée sur un double socle sculpté en ronde bosse d'un poisson. L'enclos paroissial qui entoure l'église comporte un ossuaire du 16ème siècle dont la fonction fut abandonnée en 1898.

Le porche principal est situé au sud. Il s'ouvre sous une voûte ornée, de part et d'autre, de la représentation des 12 apôtres entourant le Christ, en bois polychrome datant du 17ème siècle. A l'ouest du bâtiment, vous reconnaîtrez une des caractéristiques des églises du pays, influencée par l'école de Beaumanoir : un clocher-mur flanqué d'une tourelle d'accès montant jusqu'à la balustrade supportant le beffroi, lui-même surmonté du clocher. En forme de croix latine, cette église peut paraître démesurée dans un village qui, parfois, donne l'impression d'être désertique pour le visiteur de passage. Le chevet à noues multiples, orné de gargouilles et reliefs sculptés le dispute en diversité et en richesse avec le mobilier intérieur. Celui-ci est à la mesure de la qualité du lieu, de l'importance qu'il s'est arrogé au cours des ans. Le gothique flamboyant y intègre statues de bois et retable polychromes du 15ème au 17ème, fonts baptismaux du 14ème et baptistère du 16ème siècle mis en valeur sous une nef en forme de carène de bateau renversé décorée de motifs alliant figures humaines, animaux fantastiques et motifs végétaux.

En sortant de l'édifice, vous serez sans doute, une nouvelle fois, étonné par l'impression de disproportion d'une telle richesse lorsque le silence assourdissant de l'extérieur s'écrasera sur vous comme une chape invisible. L'intensité de celui-ci vous donnera, peut-être, l'impression d'avoir été transporté dans un village qui, soudain, vous paraîtra si petit ...

Secouez-vous : nous repartons !

Au Néolithique, les landes de Trédrez furent déjà occupées par nos ancêtres. Ils y ont laissé des traces pour bien longtemps encore : un cairn, tumulus de terre et de pierres, mais aussi trois menhirs d'une taille de 4 à 5 mètres. Lann Sahou, Lianver et Toull al Lann trônent sur le territoire de cette commune qui sera aussi occupée par les Romains, quelques milliers d'années plus tard. Rossen-Rouz recèle encore quelques vestiges d'une très ancienne briquetterie, datant de la protohistoire. Les traces de ces occupations successives se situent principalement sur une partie du territoire qui, depuis longtemps, a attiré les hommes : Locquémeau.

En partant à leur découverte, vous croiserez d'autres témoins du passé de Trédrez : quelques calvaires et fontaines, Coat-Trédrez et Kerbuzic, ses anciens moulins à eau et deux anciens fortins gallo-romains : Ty-Goech-du-Dourven et Ty-Goech-Coz. Le Rest et Kerhuic abritent encore deux colombiers des 16ème et 18ème siècle.

Si vous reprenez le chemin menant à l'ouest, poursuivant ainsi votre découverte du littoral d'Armorique, vous parcourerez les landes coiffant les falaises de Trédrez en direction de Saint-Michel-en-Grève. Sinon, avant de quitter ces lieux, laissez-vous mener vers l'est, en direction de Ploulec'h : la plus imposante demeure de Trédrez vous y attend.

Coat Trédrez est à l'intérieur des terres. Construit au 15ème siècle par les seigneurs du village, il est un des plus anciens châteaux des côtes d'Armorique. D'une architecture typiquement bretonne, il arbore une tour polygonale dans l'angle d'un corps de logis en L et trois tours circulaires à l'intérieur du logis. Ceint d'un enclos rectangulaire fortifié, il se découvre après le passage d'un portail d'entrée comportant une double porte, piétonnière et charretière. Il intègre également un colombier du 15ème siècle, dressé devant la demeure. Sa chapelle fut édifiée au 17ème siècle. Les seigneurs du lieu seront parmi les plus puissants du Trégor du 16ème au 17ème siècle, ayant pouvoir de haute et basse justice. Le premier de la lignée sera Guyomarch, à la fin du 13ème siècle. Cette seigneurie sera dispersée au 18ème siècle au profit des du Parc, lors du mariage de Françoise, la dernière descendante, avec Louis du Parc de Locmaria, puis des Goësbriand qui hériteront des terres par donation pour revenir finalement à la famille Le Pelletier, en 1766.