Plestin-les-Grèves

Ici, le Douron se faufile dans le dernier méandre de la vallée qu'il a creusée, bordé par des plages dont le sable est d'une clarté presque éblouissante lorsque le soleil en baigne les étendues.

estuaire du Douron, Plestin-les-Grèves

Plus loin, on peut deviner un pays au relief adouci, barré par le pont qui enjambe la rivière pour vous mener ensuite vers d'autres découvertes.

Presque sous vos pieds, maintenant, les premières pierres d'un édifice peu commun de nos jours, s'alignent en fondations géométriques longeant la rive. Dominant de quelques mètres une onde calme, il s'étire sur un balcon de végétation rase, à peine caché par les derniers pins de la Pointe de l'Armorique.

Ce sont les thermes du Hogolo.

Les Romains apprirent des Grecs l'usage et les bienfaits des bains. C'est ainsi que, partout où ils s'établirent en communautés d'une certaine importance, ils construisirent des complexes tels celui de Plestin. Pour peu que l'eau fut à disposition en quantité suffisante, les architectes dessinaient et faisaient édifier des lieux d'ablutions dont la plupart disparurent peu de temps après leur départ.

site du Hogolo, Plestin-les-Grèves

Les galères romaines parcourant les côtes d'Armorique trouvèrent en ces lieux un havre naturel que ces hommes venus du sud s'empressèrent d'aménager afin d'y faire commerce. C'est ainsi que dans la première moitié du premier siècle de notre ère, ils édifièrent cet établissement. Les thermes gallo-romains du Hogolo en Plestin sont les seuls, en Bretagne, à offrir un tel niveau de restauration.

Ils avaient pourtant presqu'entièrement disparu, perdant, comme bien souvent, l'essentiel de leurs matériaux au profit d'autres constructions dont certaines dévoilent encore une partie de ces rapines. Un beau jour de 1892, le hasard d'un trait de labour en exhumera les fondations et quelques pans de murs oubliés sous les terres qui les avaient progressivement couverts au cours des siècles. Des fouilles entreprises en 1938 cesseront deux ans plus tard et le site sera, une nouvelle fois, partiellement comblé. Un habitant de Plestin redécouvrira la partie chaude des thermes et, se prenant de passion pour cet endroit chargé d'histoire et la plage de sable fin qui en était presque le jardin, ... s'en fit une demeure qu'il occupera jusqu'à la fin des années 70, au 20ème siècle. A sa mort, le département acquerra le site et le mettra en valeur pour l'ouvrir au public en 1993.

chapelle Sainte-Barbe, Plestin-les-Grèves

Le sentier qui le longe vous mènera, un peu plus loin, dans un repli de la rivière, à l'une des nombreuses chapelles dont s'enorguellissait le village : la chapelle Sainte-Barbe, construite au début du 17ème siècle.

Plestin-les-Grèves a connu une histoire riche en évènements, prenant une importance telle qu'au lendemain de la Révolution elle ne comptait pas moins de 16 chapelles ! La plupart furent construites à l'intérieur des terres. Les seigneurs locaux étaient nombreux, le plus souvent de petite noblesse. Ils avaient construit leurs demeures en manoirs et châteaux, dont la plupart ont aujourd'hui disparu. Confisqués, le plus souvent, à l'avènement de la République, ils seront attribués à des paysans qui les transformeront en fermes ou métairies. A cette époque, 25 moulins à eau et 2 moulins à vent tourneront à plein régime pour assurer un développement dont l'essentiel était tourné vers l'exploitation de la terre.

port de Toul-an-Hery, Plestin-les-Grèves

Le petit port de Toul-an-Hery, blotti dans la dernière courbe du Douron, comptera au Moyen-Age jusqu'à une quinzaine d'embarcations, qui seront principalement dévolues à la pêche côtière.

Malgré une situation paraissant avantageuse, une grève immense et un estuaire calme, il ne s'y developpera pourtant jamais une conchyliculture comme en d'autres lieux de la côte.

L'époque ducale marquera un essor certain pour Toul-an-Hery qui ne se verra toutefois équiper d'un débarcadère en granit qu'en 1847. Une centaine de bateaux accosteront chaque année, assurant surtout le transport de produits agricoles et de combustibles mais aussi de produits issus de la culture du lin. A partir du 17ème siècle et jusqu'à la fin du 18ème siècle, cette culture et sa transformation assureront la richesse de propriétaires terriens et d'armateurs assurant un fret important vers la péninsule ibérique et la Grande-Bretagne. Cette activité déclinera vers la fin du 19ème siècle et cessera défintivement au milieu du 20ème siècle. La petite rade s'envasera progressivement, n'offrant désormais qu'un havre provisoire à des embarcations plus modestes.

Depuis le début du 20ème siècle, Plestin a vu s'ouvrir une nouvelle ère, qui semblait prometteuse, marquée par l'avènement du tourisme côtier ...

Las, le développement agricole effréné a provoqué la naissance d'un chancre qui s'est installé sournoisement et durablement : la pollution. Dès les premiers jours de chaleur, les marées d'algues vertes se succèdent sur ses plages, les couvrant d'un épais tapis à l'odeur nauséabonde quand le soleil les inonde de ses rayons. Agricultueurs et éleveurs, encouragés par des politicards irresponsables, ont exploité les terres d'un bassin versant idyllique avec une frénésie telle qu'ils l'ont transformé en éponge à nitrates. Les efforts déployés par les municipalités pour tenter d'effacer une réputation grandissante de côte empoisonnée les ont amené à récolter, en 2003, pas moins de 25000 tonnes d'algues et de mousses putrides pour ne pas faire fuir les visiteurs ! Pendant ce temps-là, les pollueurs perçoivent toujours aides et subsides ... continuant ainsi leur besogne de destruction du milieu ...

Vous aurez peut-être la chance de passer en ces lieux en un jour où les rives revêtiront leur aspect naturel ... Si vous avez cette chance, redescendez vers la côte et plantez, pour un dernier moment, votre bâton de randonneur au bout de la Pointe de Plestin, ornant en angle aigu la Pointe de l'Armorique. Humez alors les senteurs marines de cette Armorique du nord qui vous a enchanté depuis ses premières falaises, à Cancale, jusqu'à cette ultime étape où je vous aurai accompagné. Nous aurons gravi puis descendu des sentiers où les couleurs de la végétation succédaient au gris ou au rose des rochers d'une côte inlassablement battue par les vagues d'une mer qui ne cesse d'en sculpter les contours. Vous vous serez arrêté en maints endroits, subjugué par la beauté sauvage et fascinante d'une nature extraordinaire. Vous aurez appris certaines des légendes qui auront façonné le caractère bien trempé mais ouvert et chaleureux de ses gardiens, les bretons, lointains descendants du peuple qui a donné son nom à ce pays merveilleux :

Armor, le pays de la mer.


Restez là encore un petit moment ...

Fermez les yeux ...

Aiguisez vos sens, une dernière fois ...

Dressez l'oreille ...

N'entendez-vous pas, au large ... ?

Cette plainte lancinante et aigue venant de nulle part et de partout ... ?

Le son presque monocorde d'un biniou essoufflé ...?

Le couinement nasillard d'une bombarde se mêlant au ressac battant les rochers à vos pieds ... ?

Si c'est le cas, c'est que vous aurez, peut-être, compris l'âme profonde de ce pays ...

Vous pourrez alors vous en aller, conquis, serein, avec la certitude de revenir ... un jour.

L'Armorique vous aura pris ... elle ne vous lâchera plus.

baie de Lannion de Plestin-les-Grèves

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